Un comédien merveilleux. Apte à la grande comédie et au drame aussi bien. Cœur sensible, extrêmement sensible, oui, travailleur infatigable et comme amoureux du labeur, homme généreux, heureux d’être aimé, ami de l’amitié.
Vilar, Bref, n°54, mai 1962
En juillet 1952, Daniel Sorano est engagé au TNP, reprenant au pied levé le rôle de La Flèche dans L’Avare. Il avait fait ses classes au Grenier de Toulouse de Maurice Sarrazin, jouant notamment Scapin dans Les Fourberies.
En décembre de la même année, Gérard Philipe le choisi pour incarner, en travesti, la duègne Sorostrata dans La Nouvelle Mandragore.
Mais c’est le rôle de Sganarelle dans Don Juan qui l’assoit définitivement en juillet 1953 parmi les grands comédiens de sa génération. Sa joie de vivre toute naturelle et son physique de grand garçon à longue figure – ce qui lui vaut d’être souvent comparé à Fernandel –, le prédispose en acteur de comédie gaie. Les rôles de valet deviennent dès lors sa grande spécialité.
L’esprit de troupe qui règne au TNP l’encourage à jouer aussi bien les premiers rôles – il est Don César dans Ruy Blas – que les rôles de moindre importance – le marchand de soieries puis Giomo dans Lorenzaccio –, voire les simples apparitions – le Portier dans Macbeth. Partout ses prestations sont remarquées.
En février 1955, comme Philipe, Jean-Pierre Darras et Georges Wilson avant lui, Jean Vilar lui propose une mise en scène, celle de L’Étourdi, première pièce écrite par Molière, son auteur de prédilection. Il y incarne aussi le rôle de Mascarille. Pour ses premiers pas de metteur en scène, Sorano connaît, lui, le succès public : après Versailles, Marseille, Limoges et Amiens, la pièce bat le record de recette et, deux ans plus tard, elle est toujours au répertoire du TNP.
Mais son rôle marquant reste celui de Figaro, en juillet 1956. Les rôles et les représentations s’enchaînent alors à un rythme effréné, auxquels il faut ajouter les sollicitations de la télévision et du cinéma. Véritable casse-cou, il se blesse régulièrement en coulisse et sur scène.
Fatigué, Sorano finit par demander à Vilar un congé illimité en 1958. Son dernier rôle au TNP est Argan, dans sa propre mise en scène du Malade imaginaire.
Sa disparition en 1962, qui vient après celle de Philipe, plonge une nouvelle fois Vilar dans la tristesse et la mélancolie.
Daniel Sorano, comédien au TNP :
1952 L’Avare de Molière, mise en scène de Jean Vilar (La Flèche)
1952 La Nouvelle Mandragore de Jean Vauthier, mise en scène de Jean Vilar (Sorostrata)
1953 Lorenzaccio d’Alfred de Musset, mise en scène de Gérard Philipe (Giomo et le marchand de soieries)
1953 Le Médecin malgré lui de Molière, mise en scène de Jean-Pierre Darras (Monsieur Robert)
1953 Don Juan de Molière, mise en scène de Jean Vilar (Sganarelle)
1953 Le Prince de Hombourg de Heinrich von Kleist, mise en scène de Jean Vilar (un officier)
1953 La Mort de Danton, de Georg Büchner, mise en scène de Jean Vilar (Citoyen Ergo)
1954 Richard II de William Shakespeare, mise en scène de Jean Vilar (le Duc d’York)
1954 Macbeth de William Shakespeare, mise en scène de Jean Vilar (le portier et une apparition)
1954 Mère Courage de Bertolt Brecht, mise en scène de Jean Vilar (l’Aumônier)
1954 Ruy Blas de Victor Hugo, mise en scène de Jean Vilar (Don César de Bazan)
1955 Marie Tudor de Victor Hugo, mise en scène de Jean Vilar (Joshua Farnaby)
1955 Le Triomphe de l’amour de Marivaux, mise en scène de Jean Vilar (Arlequin)
1956 Le Mariage de Figaro de Beaumarchais, mise en scène de Jean Vilar (Figaro)
1956 Ce Fou de Platonov d’Anton Tchekhov, mise en scène de Jean Vilar (Ivan Triletski)
Daniel Sorano, metteur en scène du TNP :
1955 L’Étourdi de Molière, mise en scène de Daniel Sorano (Mascarille)
1957 Le Malade Imaginaire de Molière, mise en scène de Daniel Sorano (Argan)