Ainsi donc, à partir du 1er septembre, Georges Wilson aura la responsabilité de ce Théâtre national populaire auquel il s’est voué et dévoué pendant plus de dix ans. Le TNP continue donc. Il est confié à un homme dont les attaches avec la cause populaire sont fermes. Enfant du peuple, né banlieusard, adolescent pauvre, Georges Wilson a, peu à peu, fait son chemin sans qu’aucune sottise ou banalité ne viennent entacher sa carrière. De toute évidence, une vive affection lie cet homme à notre public… On comprendra donc que c’est sans tristesse, sans amertume, sans trouble que je m’éloigne de ce palais de Chaillot, halte de douze ans…
Hommage de Vilar à Wilson, Le Méridional, 7 mars 1963
C’est par Léon Gischia que Georges Wilson entre au TNP, en 1952. D’abord pressenti pour être le duc dans le Lorenzaccio de Gérard Philipe, il est un formidable Scoroncocolo. S’ensuivent 37 rôles, dont les inoubliables Sganarelle, Macduff, le jardinier Dimas, Danton, Créon, Turcaret, Galilée et Henry VIII.
Wilson dirige aussi cinq mises en scènes, parmi elles les créations en France d’œuvres de Monnier, Vinaver, Brecht et Valle-Inclán.
Avec Wilson, le TNP s’inscrit dans une modernité beaucoup plus large et audacieuse. Alors que Vilar n’a créé que 8 pièces contemporaines sur un total de 60 spectacles en treize ans, il en crée 28 sur un total de 54 en dix ans. Dès sa première saison, il annonce la couleur : sur quatre créations – une de moins qu’avec Vilar – il offre trois auteurs jamais joués à Chaillot : Gorki, Vercors et Dürrenmatt. Il y fait même construire un théâtre expérimental de 400 places : la salle Gémier.
Les grandes figures du TNP lui restent fidèles : Maria Casarès et Alain Cuny jouent dans La Danse de mort de Strindberg, mise en scène par Claude Régy, en 1969. Mais le nombre des abonnés de longue date décroît.
Les rapports entre le nouveau directeur du TNP et Vilar ne sont pas toujours au beau fixe, devenant même parfois conflictuels. Si la troupe garde l’exclusivité du programme du Festival en 1964 et 1965, elle la perd en 1966, avant d’en être exclue jusqu’en 1970. Tout en désirant l’ouvrir à d’autres metteurs en scène, Vilar reproche à Wilson de ne pas proposer suffisamment de créations à Avignon.
Comme Vilar, Wilson essuie la contestation de Mai 68. De plus, le gouvernement espagnol exige et obtient l’interdiction du spectacle d’Armand Gatti, La Passion du général Franco.
Wilson quitte le TNP en 1972, lorsque ce dernier se délocalise à Villeurbanne. Jack Lang lui succède à la tête du Théâtre national de Chaillot.
Georges Wilson, comédien du TNP :
1952 Le Prince de Hombourg d’Heinrich von Kleist, mise en scène de Jean Vilar (Fled Maréchal Dorfling)
1952 Lorenzaccio d’Alfres de Musset, mise en scène de Gérard Philipe (Scoroconcolo)
1952 La Nouvelle Mandragore de Jean Vauthier, mise en scène de Gérard Philipe (Timoteo, moine canaille)
1953 La Tragédie du roi Richard II de William Shakespeare, mise en scène de Jean Vilar
1953 La Mort de Danton de Georg Büchner, mise en scène de Jean Vilar (Citoyen Simon)
1953 Le Médecin malgré lui de Molière, mise en scène de Jean-Pierre Darras (Sganarelle)
1953 Dom Juan de Molière, mise en scène de Jean Vilar (Don Luis)
1954 Ruy Blas de Victor Hugo, mise en scène de Jean Vilar (Don Guritan)
1954 Cinna de Pierre Corneille, mise en scène de Jean Vilar (Polyclète)
1954 Macbeth de William Shakespeare, mise en scène de Jean Vilar (Macduff)
1955 L’Étourdi de Molière, mise en scène de Daniel Sorano (Anselme)
1955 La Ville de Paul Claudel, mise en scène de Jean Vilar (Lambert de Besme)
1955 Le Triomphe de l’amour de Marivaux, mise en scène de Jean Vilar (Dimas, jardinier d’Hermocrate)
1956 Macbeth de William Shakespeare, mise en scène de Jean Vilar (Macduff)
1956 Marie Tudor de Victor Hugo, mise en scène de Jean Vilar (Gilbert)
1956 Les Femmes savantes de Molière, mise en scène de Jean-Paul Moulinot (Philaminte)
1956 Ce fou de Platonov d’Anton Tchekhov, mise en scène de Jean Vilar (Nicolas Triletzki)
1956 Le Mariage de Figaro de Beaumarchais, mise en scène de Jean Vilar (jardinier du château)
1957 Le Malade imaginaire de Molière, mise en scène de Daniel Sorano (Diafoirus père)
1957 Le Faiseur de Honoré de Balzac, mise en scène de Jean Vilar (Goulard, homme d’affaires, créancier de Mercadet)
1957 Meurtre dans la cathédrale de T.S. Eliot, mise en scène de Jean Vilar (troisième tentateur, premier chevalier)
1958 Ubu d’Alfred Jarry, mise en scène de Jean Vilar (Père Ubu)
1958 L’École des femmes de Molière, mise en scène de Georges Wilson (Arnolphe)
1958 Le Carrosse du Saint-Sacrement de Prosper Mérimée, mise en scène de Jean Vilar (Dos Andrès de Ribera, vice-roi du Pérou)
1958 Les Caprices de Marianne d’Alfred de Musset, mise en scène de Jean Vilar (Claudio)
1959 Mère Courage de Bertolt Brecht, mise en scène de Jean Vilar (caporal)
1959 On ne badine pas avec l’amour d’Alfred de Musset, mise en scène de René Clair (le Baron)
1960 L’Heureux Stratagème de Marivaux, mise en scène de Jean Vilar (Blaise)
1960 Erik XIV d’August Strindberg, mise en scène de Jean Vilar (le Soldat Mans)
1960 Turcaret d’Alain-René Lesage, mise en scène de Jean Vilar (Turcaret)
1960 Antigone de Sophocle, mise en scène de Jean Vilar (Créon)
1960 La Résistible Ascension d’Arturo Ui de Bertolt Brecht, mise en scène de Jean Vilar (le vieil Hindsborough)
1961 Roses rouges pour moi de Sean O’Casey, mise en scène de Jean Vilar et Georges Riquier (le Révérend Clinton)
1963 Thomas More ou l’Homme seul de Robert Bolt, mise en scène de Jean Vilar (le roi Henry VIII)
Georges Wilson, metteur en scène du TNP :
1953 La Garde-Malade d’Henri Monnier
1958 L’École des Femmes de Molière (Arnolphe)
1959 La Fête du Cordonnier de Michel Vinaver, d’après Thomas Dekker (Simon Eyre)
1963 La Vie de Galilée d’après Bertolt Brecht (Galilée)
1963 Lumières de Bohême de Ramón Maria del Valle-Inclán (Max Étoile)