Il y a 60 ans, le 25 novembre 1959, disparaissait Gérard Philipe.
C’est en novembre 1950 que Gérard Philipe vint trouver Jean Vilar dans sa loge du Théâtre de l’Atelier : « Tout en me démaquillant ce soir-là, je regardais du coin de l’œil ce garçon célèbre que je connaissais mal. Grand, dressé, le geste rare, le regard clair et franc, sa présence était faite à la fois de force calme et de fragilité. Je lui dis que je préparais Avignon 1951, c’est-à-dire le Cinquième Festival et que c’était la seule entreprise dont je pouvais l’assurer. Il me répondit aussitôt qu’il serait donc du prochain Avignon. Deux jours après, je lui remettais Le Prince de Hombourg. Il dit oui. J’ajoutais : Et Le Cid ? Il baissa la tête, sourit, puis se tut. »
Il jouera 120 fois Le Prince et 199 fois Rodrigue, puis, bien sûr Lorenzaccio en 1952, et tant d’autres rôles, à Chaillot, à Avignon et en tournée, pleinement dans l’engagement et le dévouement de la troupe du Théâtre National Populaire, jusqu’à Perdican dans On ne badine pas avec l’amour en février 1959 pour sa dernière apparition au théâtre.
Sur la scène du Palais de Chaillot, le 28 novembre 1959, le soir même de son enterrement dans le petit cimetière de Ramatuelle, Jean Vilar sut trouver les mots qui disaient son respect et sa peine.
« Mesdames, Messieurs, Gérard Philipe n’est plus. Dans cette terre qu’il aimait, proche de cette Méditerranée qui le vit naître, voilà qu’il repose depuis la tombée du jour. La mort a frappé haut. Elle a fauché celui-là même qui pour nos filles et nos garçons, pour nos enfants, pour nous-même exprimait la vie. Il reste à jamais gravé dans notre mémoire. Travailleur acharné, travailleur secret, travailleur méthodique, il se méfiait cependant de ses dons qui étaient ceux de la grâce. Il reste un des plus purs visages de notre métier. Il était loyal. Cela aussi, comment l’oublier ? Il était fidèle. Fidèle à ses engagements du premier jour. Quoi qu’il advînt. Quoi qu’il advienne. Cette fidélité de lui à nous, de nous à lui, seule la mort pouvait la rompre. Elle l’a fait. Cependant, il nous faut continuer, c’est une loi de notre métier et ce sera le meilleur hommage à sa mémoire. »
Nathalie Cabrera
Directrice déléguée de l’association Jean Vilar / Maison Jean Vilar
Plusieurs livres sur Gérard Philipe sont disponibles à la librairie de la Maison Jean Vilar :
1 – Cahier Jean Vilar n°114 spécial Gérard Philipe
2 – Jean Vilar / Gérard Philipe » J’imgine mal la victoire sans toi… », Adaptation des lettres, notes et propos par Virginie Berling
1 – Gérard Philipe dans sa loge avant habillage photographie Jean Rouvet
2 & 3 – Gérard Philipe, Tournée pays de l’Est de Ruy Blas,1955 photographie Jean Rouvet
4 & 5 – Note de Jean Vilar à Gérard Philipe Collection Association Jean VIlar / Fonds Famille Gérard Philipe