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1967

21ème Festival d’Avignon, nouvelle terre du cinéma

Avec le 21ème Festival d’Avignon, du 11 juillet au 14 août 1967, Jean Vilar poursuit le tournant réformateur entamé l’année précédente.

Il commande une nouvelle affiche à Jacno : les trois clefs disparaissent et le mot « Festival », que Vilar trouve dépassé, est considérablement réduit pour laisser la place à « Avignon » dont le « A » majuscule est dessiné en lettre blanche dans un cercle mi-rouge mi-bleu.

Pour la première fois depuis 1952, le TNP n’est pas à la programmation – il n’est pas en mesure de proposer une création.

Ce détachement du Festival vis-à-vis du TNP s’illustre par la construction d’une nouvelle Cour d’honneur, en remplacement de celle de 1952, bâtie spécialement pour la troupe de Chaillot. Camille Demangeat, assisté de Pierre Saveron pour les éclairages, réalise une salle de 3 187 places. Elle est étrennée par Maurice Béjart, Roger Planchon et Jorge Lavelli. Le jeune metteur en scène argentin permet le grand retour de Maria Casarès, dans le rôle de Médée. Avec Demangeat, Saveron et Casarès aux côtés de Vilar, l’âme du TNP n’a pas totalement disparu.

Vilar ouvre un peu plus les portes du Festival aux autres arts, le cinéma en l’occurrence, avec La Chinoise de Godard dans la Cour, où un grand écran de toile a été tendu, après la Messe pour le temps présent de Béjart et Pierre Henry. Vilar et Godard se sont rapprochés autour de la défense de La Religieuse de Rivette, film censuré par le gouvernement gaulliste.

On sait à quel point le cinéaste des Cahiers du cinéma, à l’instar de Truffaut, détestait la filmographie de Gérard Philipe, mais aussi le Théâtre national populaire. Les seules affinités de Vilar pour la Nouvelle Vague sont partagées avec Franju, auteur d’un documentaire sur le TNP, et Varda, ancienne photographe du Festival et Chaillot, réalisatrice entre temps de Cléo de 5 à 7.

Vilar donne aussi une place à la musique contemporaine, en proposant 14 concerts dans le Verger Urbain V, avec la participation de l’orchestre national de l’ORTF.

Enfin, il continue d’inviter les jeunes compagnies et les auteurs contemporains, en leur mettant à disposition une nouvelle salle, offrant 700 places : le Cloître des Carmes reçoit le CDN du Sud-Est d’Antoine Bourseiller.

 

Avignon est en train de craquer dans sa coquille, dans son costume, son armure. Il n’a pas seulement grandi, il ne s’est pas seulement diversifié. Il a proliféré en tous sens. Avignon n’est plus une ville qui a un festival, c’est un festival qui a une ville.

Jean Lacouture, Le Monde, 18 août 1967

 

Théâtre :

La Baye de Philippe Adrien, mise en scène d’Antoine Bourseiller, Cloître des Carmes ;

Bleus, Blancs, Rouges ou les Libertins de et par Roger Planchon, Cour d’honneur du Palais des Papes ;

Medea de Sénèque, mise en scène de Jorge Lavelli, Cour d’honneur du Palais des Papes ;

Le Métro fantôme de LeRoi Jones, mise en scène d’Antoine Bourseiller, Cloître des Carmes ;

Silence, l’arbre remue encore de François Billetdoux, mise en scène d’Antoine Bourseiller, Cloître des Carmes ;

Le Tartuffe de Molière, mise en scène de Roger Planchon, Cour d’honneur du Palais des Papes ;

Le Triomphe de la sensibilité de Johann Wolfgang von Goethe, mise en scène de Jorge Lavelli, Cour d’honneur du Palais des Papes.

Danse :

Messe pour le temps présent, chorégraphie de Maurice Béjart, Cour d’honneur du Palais des Papes ;

Roméo et Juliette, chorégraphie et mise en scène de Maurice Béjart et composition d’Hector Berlioz, Cour d’honneur du Palais des Papes.

Cinéma :

La Chinoise de Jean-Luc Godard, Cour d’honneur du Palais des Papes.

Musique contemporaine, Verger Urbain V.

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