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1932

Arrivée à Paris

À l’automne 1932, Jean Vilar quitte brutalement le foyer familial sétois et prend le train pour Paris avec une seule idée en tête : écrire.

Je suis monté à Paris parce que je pensais que je ferais une carrière artistique ; mais une carrière théâtrale, pas du tout…
Je voulais écrire. Je voulais dire certaines choses, donc les écrire.
Propos et confidences, émission télévisée. Radio Canada, 1970

Son travail de ‘‘pion’’ au Collège Sainte-Barbe lui permet de préparer une licence de lettres classiques à la Sorbonne, tout en suivant les cours du philosophe Alain au lycée Henri IV. Des petits carnets annotés témoignent de la ferveur qu’il nourrit alors pour Homère, Platon, Cicéron, Shakespeare, Pascal, Rousseau et Victor Hugo.

La même année, le virus du théâtre le pique : s’il entraîne son ami d’enfance, Antoine di Rosa, au Théâtre de l’Atelier pour assister à une répétition de Volpone de Ben Jonson – montée par le directeur des lieux Charles Dullin -, c’est seul qu’il assistera, l’année suivante, aux répétitions du Richard III de Shakespeare.

Admis par la suite aux cours de l’Atelier, il y suit une formation drastique dès 1935 (improvisation le lundi ; théâtre moderne le mardi ; travail de diction le mercredi ; hébertisme le jeudi ; jeu le vendredi ; leçon de Dullin le samedi). Ses camarades s’y nomment Jean Marais, Roger Vadim, Jean-Louis Barrault, Jacques Dufilho. Lorsqu’il joue Perdican d’On ne badine pas avec l’amour de Musset, Madeleine Robinson lui donne la réplique dans le rôle de Camille. Travailler le rôle d’Hamlet lui permet d’appréhender le jeu et la mise en scène de l’œuvre shakespearienne.

Très assidu au cours de Dullin, et trop négligeant dans ses tâches de surveillant, il est renvoyé de Sainte-Barbe le 1er juillet 1935. Il partage alors la régie de l’Atelier avec Pierre Valde. À partir de novembre, il fait aussi de la figuration dans Le Faiseur de Balzac, Le Camelot de Vitrac et Jules César de Shakespeare. Il reste quatre ans auprès de Dullin, jusqu’au service militaire.

Il ne fut jamais question d’aller chercher ailleurs un autre maître. Notre amour était calme, sans chicane, sans phrases, ouvrier. Je ne me souciais pas de savoir qu’il y avait alors à Paris d’autres écoles, d’autres maîtres, d’autres directeurs. Cet amour me suffisait. Il nous faudra transmettre à nos cadets ce que fût, ce que reste Monsieur Dullin : un exemple.
Interview à Réforme, avril 1952

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